Architecture un lieu

Le recondi­tionnement revu avec Brio

Par Nat Lecuppre, le 24 avril 2023.
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Les produits reconditionnés prennent de plus en plus d’importance dans la vie des consommateurs. En 2021, on note + 20 % des ventes high-tech soit plus de 3,1 millions de smartphones revendus jusqu’à 70 % moins chers selon les modèles qu’un neuf.

Un lieu physique pour une seconde vie

Jusqu’à présent, on trouvait des sites web de revente pour ces produits de seconde vie. Désormais, avec YesYes, on peut mettre un lieu physique derrière cette activité. YesYes s’est installé dans le centre de Caen (14), dans un bâtiment inscrit depuis 2003 aux monuments historiques et qui abritait l’ancienne chambre de commerce.

Un positionnement pour le climat

L’agence de design global Brio figure parmi les 150 entreprises Françaises qui participent à la Convention des Entreprises pour le Climat de 2021 à 2022. Elle a eu pour mission d’imaginer un lieu physique pour cet acteur du web depuis 2018. Fidèle à ses valeurs et ses engagements durables, Brio a proposé un concept atypique avec pour objectif de rassurer une clientèle qui hésite encore pour le reconditionné.

Le parti pris architectural a été de concevoir un lieu design et de créer de la proximité pour un achat en toute confiance. Les lieux situés au rez-de-chaussée du 98 rue de Bernières à Caen sont répartis en trois zones. À savoir : un showroom, un espace conseil et un atelier.

1er Atelier Boutique du reconditionné

Comme demandé par les ABF, la vitrine et l’enseigne se fondent dans la trame architecturale du bâtiment. La vitrine toute hauteur laisse entrer la lumière naturelle. En entrant, côté rue, le client découvre une boutique. Le showroom expose une large gamme de produits high-tech garantis deux ans et reconditionnés dans l’atelier YesYes (smartphones, iPad, Mac Book et consoles de jeux).

Un second espace accompagne et conseille. Les services proposés permettent de répondre aux attentes des clients (conseil achat, reprise, réparation, recyclage…). Puis au fond du flagship, on voit en toute transparence un atelier technique situé derrière une grande verrière. Les techniciens contrôlent les produits, les réparent et les reconditionnent pour une remise en vente en boutique ou sur le site yes-yes.com.

Une seconde vie, un geste pour le climat

Ce choix d’achat présente un bénéfice écologique (80 % de l’impact environnemental gagnés par rapport à la provenance, la fabrication initiale et la phase de production mais aussi la réduction des déchets).

Les sondages démontrent que 56 % des Français hésitent à choisir des produits reconditionnés et qu’il y a un manque de confiance pour 37 % d’entre eux. 34 % des acheteurs sont insatisfaits de leur achat effectué sur des plateformes en ligne (37 %) soit l’équivalent de 53 % des achats de produits reconditionnés.

Un blason redoré

YesYes donne une image premium au reconditionnement. La configuration des lieux rassure et booste les ventes. Les espaces sont lisibles, clairs, spacieux et design. Six mois après son ouverture, les ventes de la boutique dépassent 60 % des objectifs initiaux et ils ne cessent de croître. Le CA a doublé depuis le lancement de la boutique de Caen. Trois nouveaux YesYes ont ouvert cet été (Bordeaux, Marseille et Annemasse). D’autres ouvertures en France sont prévues en 2023.

Les deux cofondateurs, David Mignot et Christophe Perrin, anciens salariés de Sony Mobile France, ont su construire la marque YesYes sur leurs valeurs et leurs convictions. Ils souhaitaient des produits de qualité, 100 % français (en provenance de particuliers, Orange France, Fnac…), du high-tech éco-responsable, recyclable et un engagement sociétal. Ce dernier est atteint puisqu’il a permis l’embauche de 30 personnes en Normandie, d’une réinsertion professionnelle de jeunes en difficulté (60 % des techniciens de l’atelier) et de personnes en situation de handicap avec le partenariat de l’Entreprise Adaptée Locale.

Ce concept engagé est un véritable succès mené avec Brio. Le projet a été primé aux Mapic Awards 2022 dans la catégorie Best Store Design By French Designers.

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    YesYes

    98, rue de Bernières
    14000 Caen
    Tél. : +33 (0)2 31 26 62 02
    www.yes-yes.com

    Brio

    Péniche Motus

    22, boulevard Griffoul Dorval

    31400 Toulouse

    Tél. : +33 (0)1 45 83 00 61

    www.brioretail.com

    Retrouvez cet article dans le nda numéro 52
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    Quartiers revisités, le renouveau

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    MBL mène toujours l’enquête

    Par Anne-Marie Fèvre, le 22 janvier 2024
    Très fouineurs, les architectes Sébastien Martinez-Barat et Benjamin Lafore ont bien investigué. En 2023, à Paris, ils mettent leurs élucidations en pratique, avec la reconversion de l’îlot haussmannien de l’APHP. On les a d’abord repérés à fureter un peu partout en France. À la revue Face b, avec Aurélien Gillier, où ils écrivent. À partir de 2015, on les suit à la Villa Noailles, où ils inventent des expositions aux sujets peu étudiés, comme les skateparks et les boites de nuit. On les retrouvera lors de la reconversion en cours de La Main Jaune à Paris. Les jeunes architectes Sébastien Martinez-Barat et Benjamin Lafore intriguent. Entre pop culture et radicalisme italien, un peu dandy un peu hardis, ils affirment leur volonté de participer à un débat sur l’architecture, qu’ils abordent « comme une recherche, une enquête ». Sébastien-Barat écrit : « En architecture on ne sait rien, notre savoir de réserve ne nous donne pas de longueurs d’avance… L’enquête dessine une trajectoire non linéaire, imprévisible et faite d’allers et retours. » Elle est la condition de la pensée éclectique qu’ils adoptent ; l’éclectisme serait « l’expres­sion d’une enquête bien menée »1. Ronds-points C’est peut-être parce qu’ils ont vécu dans des cités pavillonnaires, du « vernaculaire industriel », que ces deux jeunes larrons, nés en 1983 à Toulouse, vont « se reconnaître » à l’école d’architecture de la Ville rose autour d’une vision architecturale et urbaine peu enseignée. Comme les ronds-points et lotissements. Pas dans un culte d’une banalité esthétisée si prisée, mais dans un rapport au réel, au quotidien, avec sincérité. Puis ils « montent » à la capitale pour poursuivre leurs études à Paris-Malaquais dont ils seront diplômés en 2008. Ils font un stage chez l’artiste Mathieu Mercier, plutôt que chez un architecte. Avec lui, ils se frottent à la précision de l’objet, et la culture de l’exposition. Les MBL sont en rupture avec le dogme moderne, la politique des auteurs, les styles formels des œuvres de démiurges. Ils regardent du côté de l’architecture non construite, des super-architectures radicales des Italiens des années 70. Ils appartiennent à une génération en rupture économique, sociale et climatique. Une remise en cause qui les confronte à de petits projets, aux détails de l’existant, à la rénovation. Pour retrouver les qualités de ce déjà-là. En 2013, Martinez-Bart et Lafore fondent MBL architectes à Paris. En 2014, lors de la 14e Biennale d’architecture de Venise, ils « retournent notre regard » au Pavillon Belge, avec « Intérieurs. Notes et Figures » : des relevés des décors banals de maisons et d’appartements en Belgique. En 2016, à la Villa Kujoyama de Kyoto, ils étudient les folies, « l’architecture brève et explicite » comme autant d’« hypothèses d’architectures ». Cette même année, ils sont lauréats des Albums des jeunes architectes et paysagistes, du ministère de la Culture. Ils savent se placer à de drôles d’endroits pour des rencontres, aux bons moments. La mer construit En 2022, ils capitalisent leur démarche buissonnière à Bordeaux, avec une exposition conséquente à Arc-en-Rêve, « Impasse des Lilas ». Un lieu générique, il y en a 841 en France ! Ils y explorent ce territoire « ni ville ni campagne », la propriété
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    Urbanisme

    Nancy, un cas d’école(s)

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    Bien qu’à peine millénaire, l’histoire de la cité ducale connut la renommée à plusieurs reprises et fit école à plus d’un titre tant dans les arts qu’en matière urbaine en étant le premier district de France dès 1959. Forte de son patrimoine architectural hérité de la Renaissance, du XVIIIe siècle, de la révolution industrielle et de l’Art nouveau – qui y naquit –, la capitale Lorraine – désormais Métropole et desservie par le TGV – est doublement labellisée au titre des métiers d’art mais aussi de la French tech (sciences et médecine). Plus de 20 % des 256 000 habitants du Grand Nancy sont des étudiants et des chercheurs. Une histoire sous influences Né au XIe siècle du démantèlement de l’empire carolingien, le duché établit alors sa capitale à Nancy. S’il ne reste que peu de témoins de la Ville Vieille médiévale, son patrimoine s’est considérablement enrichi, tout d’abord, à la fin de la Renaissance avec la construction d’une Ville Neuve – au plan orthonormé – décidée par le duc de Lorraine Charles III. On doit au dernier duc souverain 1, Stanislas Leszczynski, de relier les deux villes entre elles au travers d’une monumentale place royale encadrée par l’hôtel de ville, l’Opéra, le Grand hôtel de la Reine et le Musée des Beaux-Arts. Richement ornée de grilles enluminées d’or, elle porte désormais son prénom. Au lendemain de la défaite de la guerre de 1870, l’Alsace-Moselle est annexée au tout nouvel empire allemand. Restée française, Nancy voit alors arriver massivement des capitaux, des entreprises et leurs savoir-faire qui vont booster sa révolution industrielle en la parachevant. La manufacture des tabacs, les cristalleries Daum, la société de distribution d’éclairage public Fabius Henrion et Cie y voient le jour, cette dernière est rachetée dès 1898 par la Compagnie générale d’électricité2, tout comme la Manufacture nancéienne de chaussures devenue depuis les Chaussures André. Cette irrésistible montée en puissance s’accompagne d’une alliance provinciale inédite des industries des métiers d’art et des artistes afin de promouvoir la collaboration entre différentes disciplines, favoriser la recherche et l’innovation tout en prônant une politique sociale éclairée. Le maître verrier, ébéniste et céramiste (botaniste de formation) Émile Gallé et l’homme d’affaires et mécène Eugène Corbin les regroupent, en 1901, au sein de l’École de Nancy ayant pour devise « L’art dans tout, l’art pour tous ». Louis Majorelle, les frères Auguste et Antonin Daum, Jacques Gruber ou encore Victor Prouvé contribueront à sa renommée comme en atteste le musée homonyme qu’est venue récemment compléter la Maison Majorelle construite en 1902 par Henri Sauvage. L’École est à l’origine de l’Exposition internationale de l’Est de la France qui réunit en 1909 plus de deux millions de visiteurs à Nancy dans le secteur du Parc Sainte-Marie du nouveau quartier se développant à l’ouest de la voie ferrée. L’architecte Louis Lanternier y fait surgir une source thermale dont l’eau à 36°C va permettre de développer des thermes. Son essor se poursuit. L’homme phare de l’époque en sera Jean Prouvé, le fils du peintre Victor Prouvé. Ferronnier de formation, il
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    L'événement

    Dans le labyrinthe du design 80

    Par Anne-Marie Fèvre, le 22 juin 2023
    Expositions et livres se bousculent pour célébrer la décennie qui a redéfini le design, de Nestor Perkal, Philippe Stark à Martin Szekely… Retour sur des carambolages foisonnants. Il y a toujours eu de sempiternels engouements pour le passé ! La nostalgie cette fois s’empare des années quatre-vingt, temps revisités comme légers, démocratiques, libres. Elles ont certes marqué la fin des dogmes idéologiques, ouvrant à la «complexité» du monde théorisée par Edgar Morin. C’est vrai qu’elles ont été exubérantes et festives ! Cependant ces années furent aussi mal aimées : années fric, frime, clip, pub, look, coke… Années fastes aussi de l’État partenaire de la culture, mais apparition du relativisme culturel, de l’individualisme, du libéralisme, de l’ultra-starisation, de la communication. «On nous Claudia Schiffer» chantera plus tard Souchon en guise de bilan en 1993. Cet «âge d’or» fut en plus percuté par le Sida, les SDF, Tchernobyl… Mais en 2022, période de toutes les sobriétés et angoisses, ces eigthies sont revues comme une extravagante embellie qui fait envie, chantée par Chagrin d’amour : «Chacun fait, fait, fait, C’qui lui plaît, plaît, plaît…» C’est particulièrement du côté des musées, galeries de design et de l’édition que le design fait un grand retour. Car à l’époque, redéfini, il explose. Le mot est enfin utilisé en France. Il est représenté par une star populaire, Philippe Starck, l’objet aussi quotidien que sa brosse à dents s’arrache en 1989 1. Nestor Perkal, un éclaireur Passons d’abord à Bordeaux. Au Musée des Arts Décoratifs (Madd), Nestor Perkal a été présenté en « éclaireur » jusqu’au 8 janvier, lui qui a si bien saisi cette période 2. Et cela tombe à pic, une première biographie lui est consacrée chez Norma 3 (voir encadré). Sa naissance en 1951 en Argentine, sa formation d’architecte à Buenos Aires, sa passion pour l’art cinétique, ses voyages d’Amérique du Sud à l’Italie… ont esquissé l’identité de l’homme qui arrive à Paris en 1982. «Éclaireur» donc car dès son arrivée, il expose, dans ses galeries près de Beaubourg et puis du Marais, les meubles et objets du mouvement milanais Memphis, puis ceux de jeunes créateurs comme Javier Mariscal, Nathalie Du Pasquier, George Sowden… L’exposition est introduite par ce talent de découvreur. Se dressent ensuite quelques-uns de ses meubles noirs, dont le bureau Azul qui fera reconnaître son travail de designer. Avec les pièces réjouissantes d’Algorithme, maison d’édition créée en 1987 autour du métal argenté, c’est en directeur artistique qu’il convie d’autres designers à innover. L’exposition opère un choix rigoureux d’œuvres parlantes. À chaque fois, une nouvelle pièce confirme la passion de Perkal pour les techniques artisanales. Il se penche sur bien des matériaux – cuir, verre, bois, tissus, miroir. En 1992, il collabore avec Lou Fagotin pour la collection Les Rivières. Où il ravive la tradition des feuillardiers, de la Creuse au Périgord, en clouant entre elles de simples branches de châtaignier. Toujours passeur, à Limoges, il dirige le CRAFT (Centre de recherche sur les arts du feu et de la terre) de 1992 jusqu’en 2009. Avec lui, artistes et designers

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