Architecture un lieu

Un décor psychédélique

Par Nat Lecuppre, le 24 avril 2023.
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Le collectif pluri­disciplinaire Uchronia est beaucoup plus qu’un cabinet d’archi­tecture. Son nom évoque la notion du temps fictif et de l’éphémère qui se retrouve dans ses projets.

Sonia Rykiel s’installe Rue Royale

Uchronia a signé l’architecture, l’agencement et le design de la nouvelle adresse Sonia Rykiel. 50 ans après l’ouverture de la boutique à Saint-Germain-des-Prés, la maison a franchi la rive droite pour s’installer au 18, rue Royale. G-III Apparel Group, nouveau propriétaire de la maison, souhaitait un lieu audacieux et créer l’événement pour la fin d’année 2022. Il a confié le projet à sa directrice artistique, Léa Sebban et à Uchronia.

Un lieu d’exception singulier

L’objectif premier était de concevoir un pop-up store qui se démarquerait du marché actuel, de garder l’esprit Sonia Rykiel tout en le modernisant. On devait avant tout retrouver son ADN. Les espaces ont été pensés pour plonger les clients dans l’univers de la couturière et designer française où sont présentées les pièces iconiques. Le parti pris architectural d’Uchronia a été de concevoir des espaces colorés, graphiques, sensuels et glamours. Les matériaux retenus soulignent le côté contemporain (laque, maille, métal, acier brossé, moquette colorée…) tandis que les couleurs vives font un clin d’œil aux années de création de la marque (mai 1968) et à une époque psychédélique. Derrière un rideau en maille métallique, une Forever Room expose les pièces maîtresses de la maison.

Le concept architectural

Les architectes ont joué avec l’équilibre et l’espace, cassant les codes et donnant une impression d’infini avec des jeux de miroirs du sol au plafond. Le parcours est ponctué de surprises. On trouve par exemple des livres dans les sacs exposés pour nous rappeler que la reine de la maille était aussi une passionnée de littérature. La lumière a fait l’objet d’un travail spécifique : dans l’intérieur des niches des meubles, des LEDs valorisent les vêtements et les accessoires, comme des œuvres d’art. Des glaces intégrées à certains mobiliers permettent de refléter la lumière et d’éclairer entièrement les produits exposés. À l’ère digitale, la marque est aussi sur le web et des écrans ont été installés dans les lieux.

La rue Royale finalement ne sera pas qu’un pop-up puisqu’à ce jour, cet écrin est conservé pour accueillir les nouvelles collections, les pièces culte, mais aussi les emblématiques rayures, signature de Sonia Rykiel.

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    Urbanisme

    Rémalard-en-Perche, un cœur plus vert

    Par Anne-Marie Fèvre, le 22 novembre 2023
    Ce bourg percheron réaménage sa place Charles de Gaulle. Redessinée, sécurisée, aplanie, végétalisée et bientôt embellie, elle regarde au loin le doux paysage de collines. Fin des travaux en juillet. Quand on arrive à Rémalard en venant des Aubées, s’offre une belle grimpette pour gagner la place Charles de Gaulle, très en pente elle-même. Situé à 160 km de Paris, ce bourg est niché au cœur de l’ancien comté du Perche, qui dura neuf siècles et fut supprimé à la Révolution. Son relief de collines ourlées de forêts, de bocages, de mottes féodales et de rivières unifie encore cette contrée si Douce France aux nombreux manoirs et fermes aux crépis ocre, devenue en partie Parc naturel régional. « Mais c’est où le Perche ? ». Car ce pays est à cheval sur 3 régions (Basse-Normandie, Centre, Pays-de-la-Loire) et 4 départements (Orne, Eure-et-Loir, Loir-et-Cher, Sarthe). Dans ce décor harmonieux, la place rémalardaise – un triangle de 3 793 m2 bitumés très dénivelé – détonait. Elle ressemblait à un parking, avec fleurs en potiches, sans arbres. Les usages étaient confus à ce carrefour mal délimité, entre les rues de l’Église, des Moulins, de Mortagne et Marcel Louvel. « Cela faisait des années que cette place devait être refaite, explique le maire Patrick Rodhin. Il y a eu bien des projets, tombés à l’eau. Nous sommes repartis du dernier plan, pour l’améliorer. Il fallait sécuriser cette zone de rencontres, l’aplanir, créer des circulations partagées entre piétons, voitures, vélos, la verdir, l’adapter au réchauffement climatique, et l’embellir. Pour redonner vie à ce cœur de bourg avec ses commerces essentiels. Deux bâtiments en ruine ont été détruits, on va reconstruire deux logements sociaux avec le bailleur Orne Habitat. Les travaux, qui ont commencé fin août 2022, se déroulent bien. On a de bons architectes et paysagistes. La nouvelle place devrait revivre lors du vide-grenier de juillet ». La maîtrise d’œuvre est assurée par l’IRPL du Mans (Ingénierie routière des pays de Loire), par BET VRD, bureau d’études techniques, et par Vert-Latitude, atelier créé en 1998 par le paysagiste concepteur Jean-Baptiste Flichy. « Il fallait inventer un récit, bien regarder Rémalard, explique-t-il. Ce village était traversé par l’ancien chemin royal Paris-le Mans. Il ne l’est plus. Il y avait une motte féodale. Disparue. Nous sommes loin de l’Église, de la mairie. Il fallait s’appuyer sur autre chose. L’atout de ce bourg, c’est le paysage percheron que l’on voit au loin. On a gardé son caractère rural, pour récréer une place connectée au grand paysage et y remettre la nature. Il y avait aussi une halle couverte jusqu’au XVIIIe siècle. Pour signifier sa mémoire, on a créé une partie haute bordée par un muret, délimitant 30 places de parking, et le marché. Dans la partie basse, on marque mieux la D920 qui traverse, la vitesse est réduite, la priorité est aux piétons. Chaque niveau est aplani. On a soigné les accès aux commerçants ». […] l’esplanade de Rémalard, qui compte une trentaine de pas-de-porte, est digne d’une carte postale. Sébastien Garnier Il a fallu aussi
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    Urbanisme

    Beaumont, le maire, les architectes et les locataires

    Par Anne-Marie Fèvre, le 1 décembre 2023
    Sous les châtaigniers ardéchois ont poussé six Bogues, des logements sociaux. Écologie, autoconstruction, chantier participatif ont nourri cette démarche rurale pionnière entre élus, Nouveaux commanditaires, l’atelier Construire et les habitants. « En mai 1968, nous n’avions pas réussi à changer le monde. Alors, j’ai eu envie de créer mon petit monde à moi. » C’est ainsi qu’en 1974, Pascal Waldschmidt, polytechnicien né en 1949, quitte la ville pour s’installer à Beaumont et ses quatre hameaux : Le Blat, Sarrabasche, Issac et La Roche. Situé sur l’une des pentes du coteau cévenol de l’Ardèche du sud, ce cul-de-sac, déserté et en ruines, ne comptait plus que 162 habitants. L’ancien citadin vit là en communauté, ils retapent de vieilles maisons, s’orientent vers l’agriculture : élevage de chèvres, de cochons, et récolte de châtaignes… Mais la petite bande explose. Lui reste, avec sa femme, tout à son cocon rural. Le couple a des enfants, il va s’investir dans la vie locale pour l’école, lui devient conseiller municipal, puis maire de 2001 à 2020. Édile actif et implanté, il est à l’origine, avec le conseil municipal, de la construction de logements sociaux dans son village. Alors qu’une vie locale se ranime peu à peu à Beaumont, le déclin de l’agriculture et le vieillissement de la population ne permettent pas d’attirer de jeunes actifs. « Les jeunes n’avaient pas les moyens d’habiter là, explique Pascal Waldschmidt, la moitié des résidences sont secondaires, très chères, il n’y a pas de locatif privé. On a transformé trois ruines en logements, mais cela nous est revenu plus cher que du neuf. On a alors imaginé construire du neuf. On a acheté un terrain, une ancienne châtaigneraie à Blat, et on a élaboré un PLU ». Mais avec qui construire ? Il y a beaucoup d’heureux hasards à Beaumont, lieu de passage l’été. Les élus rencontrent une médiatrice des Nouveaux commanditaires de la Fondation de France (1), Valérie Cudel. Elle va accompagner ces apprentis maîtres d’ouvrage pour passer commande d’une œuvre d’art, ici un projet d’architecture. Après avoir exploré diverses pistes, ils se tournent vers l’atelier parisien Construire. Une première rencontre, fructueuse, a lieu avec Patrick Bouchain en 2008. Autour de Construire ensemble (2), ils se comprennent à merveille. Ils optent pour la conception de huit habitations. Le chantier sera aussi suivi par les architectes Loïc Julienne et Sébastien Eymard. Une banque d’eau C’est un système qui s’inspire des civilisations anciennes, dont les Perses. Il a fait ses preuves à Madagascar, grâce à Thierry Labrosse, un entrepreneur franco-malgache spécialiste de la dépollution d’eau. Il a inventé le REEPS, un réservoir d’eau enterré rempli de sable. Ce processus a vite intéressé Pascal Waldschmidt pour Beaumont. « Car on est juste en eau, explique-t-il, il y a 260 habitants, mais 1 200 en été. Et on n’a pas le droit de capter l’eau les sources ». La commune s’est lancée, la première en France, et a implanté l’été dernier cette « nappe phréatique artificielle » près du col des Cayres. L’eau de source est stockée et enterrée dans une bâche hermétique, le sable a été
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    Architecture, l'esprit du lieu

    Milla Montis Hotel, au cœur du Tyrol italien

    Par Lionel Blaisse, le 8 janvier 2024
    L’architecte milanais Peter Pichler livre dans son Tyrol natal un hôtel d’une trentaine de chambres sur la petite commune alpine de Maranza, qui revisite l’architecture vernaculaire des Dolomites. Ces contreforts verdoyants accueillirent au départ des éleveurs dont les fermes superposaient astucieusement les étables, l’habitation et la grange. Elles inspirèrent la morphologie et la modénature des premiers chalets résidentiels qui à leur tour nourrirent l’imaginaire des hôteliers. Quoique résolument contemporaine, l’architecture plutôt « graphique » du Milla Montis Hotel assume cet héritage architectural sans néonostalgie. Genèse du projet Les parents du jeune chef cuisinier Roland Oberhofer avaient transformé l’ancien moulin de Maranza en une petite pension, désormais exploitée en hôtel. Ceux de sa femme Franziska avaient créé des gîtes dans leur ferme bio. Le couple portait dans ses gènes l’instinct d’hospitalité. Ils concrétisèrent donc leur ambition à proximité du deux étoiles familial dont la clientèle pourrait jouir des aménités du nouvel établissement. Rêvant d’un lieu différent des archétypes tyroliens proposés par leurs concurrents, ils organisèrent une petite consultation privée à partir de leur concept : un hôtel d’une trentaine de chambres, toutes avec une généreuse terrasse face aux Dolomites, certaines avec leur propre spa venant ainsi parachever le complexe bien-être et sa piscine chauffée extérieure. Un restaurant fera découvrir l’inventive cuisine bio de Roland. L’architecture sera en harmonie avec la culture locale et la nature environnante tout en s’inscrivant dans son siècle. Juste ce qu’il faut Le projet de Peter Pichler l’emporta en fragmentant l’édifice en quatre unités afin de se rapprocher de la volumétrie des granges d’antan. L’ensemble s’enchâssant dans la pente pour minimiser son impact, la réception, le bar et le restaurant s’implantèrent au second niveau, le premier se dédiant en intégralité à l’hébergement tandis que le rez-de-jardin accueillit l’espace bien-être avec sauna, hammam et salles de soins, de relaxation et de méditation avec accès direct au bassin extérieur. Bardé de bois noirci, chacun des frontons est découpé par une immense alvéole curviligne transposant le fameux cœur découpant les volets des chalets tyroliens. Elles génèrent ainsi de vastes terrasses offrant aux chambres intégralement vitrées un panorama époustouflant. Simple, fonctionnel et intemporel, l’agencement intérieur fait la part belle au frêne tandis que les assises sur mesure s’habillent de… loden !

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